Est-ce que tu peux te présenter en quelques mots et me parler de ton histoire avec le vélo ?
Olivier : J’ai 41 ans, j'ai grandi en région parisienne, plus précisément dans la Chevreuse, un site particulièrement adapté justement à la pratique du vélo. J'ai commencé à découvrir les plaisirs de la petite reine dans la forêt de Rambouillet, de manière régulière et sportive, mais je ne faisais pas de vélo en itinérance. Les balades à vélo, j’ai découvert plus tard, vers 25 ans. J’ai rencontré Adeline, et l’on partageait tous les deux l'envie de partir loin, en Afrique. On a d’abord réalisé plusieurs voyages sac à dos, et un jour on s’est dit, pourquoi ne pas tenter un voyage plus long et avec un moyen de déplacement qui nous laisserait le temps de « cheminer ». Comme c’était un projet de couple, on n’a choisi le tandem, pour la symbolique d’avancer dans le même effort. En janvier 2009, on est parti tous les deux pour notre premier grand périple qui allait un peu changer notre existence. L'idée était de traverser le continent africain de Paris jusqu'au Cap de Bonne-Espérance. On est arrivé au bout de l’aventure en 18 mois. Cet évènement a été très marquant, et on a pris conscience qu'on pouvait, avec un vélo, traverser un pays, un continent et, pourquoi pas, faire le tour du monde ! A partir de là, on a rythmé notre vie de cette manière, en se disant qu’à chaque moment important, on partirait à vélo pour prendre du recul, pour se retrouver.
Quand tu es devenu père, c’était une évidence de partir à vélo en famille ?
Olivier : Quand on a eu notre premier enfant, on s’est rappelé notre promesse, celle de repartir à vélo à chaque moment clé de notre existence. Et puis, dans notre entourage, beaucoup de gens nous disaient « maintenant, vous allez être parents, c’est terminé l’aventure. » Par défi peut-être, ça nous a poussé à repartir pour une belle aventure, une vraie si je peux dire, sur un terrain engagé. Voilà comment est né notre projet de voyage à vélo en Amérique du Nord, avec pour objectif de traverser les montagnes rocheuses via la fameuse Great Divide, avec Axel, notre fils de dix mois.
Comment passe-t-on de telles aventures au bout du monde à des voyages à vélo en famille plus près de chez soi, en France ou en Europe ?
Olivier : Entre l’Afrique et le départ pour les Etats-Unis, j’avais déjà réalisé des voyages à vélo de proximité. Après avoir été si loin, j'avais une sorte de manque que j’essayais de combler, sauf que je n’avais pas la possibilité de partir tous les quatre matins pendant plusieurs semaines aussi loin... Et je me suis dit, mais en fait est-ce que c’est vraiment une histoire de distance et de kilomètres ? Au final, c'est simplement le fait de monter sur ton vélo et de changer un peu de regard. J’ai écrit un bouquin, Sur le pas de ma porte, qui est le récit de cette démarche, là où, un jour, j’ai juste ouvert ma porte, et j'ai regardé un peu l'horizon. Là où j’habite, je peux voir les Alpes quand il fait beau, le Mont-Blanc, les contreforts du Jura et le Massif Central. Et je me suis dit, pourquoi tu n’irais pas découvrir ces reliefs à vélo. Voilà comment est né mon projet solo, auquel j'ai ajouté les massifs des Vosges et des Pyrénées, et j’ai parcouru près de 5000 km à travers ses grands massifs montagneux. Ces voyages à vélo en France ont été déterminants pour concevoir ma vision du vélo. J’ai réalisé qu’en vivant des aventures de proximité, je pouvais complètement renouer avec l'esprit qui m’habitait quand j’étais au fin fond de la Tanzanie ou je ne sais où au Sahara. C'est vraiment une histoire de regard plus que de destination. On peut arriver à ressentir une sorte de dépaysement, d'exotisme en étant juste à côté de chez soi à partir du moment où on change ses habitudes. Et le vélo, c'est vraiment puissant. T’es vraiment dans le tableau, tu te fonds dans le paysage, tu vis tout intensément, complètement dans l'environnement et ça change ton rapport à la nature et à ce que tu peux découvrir.
Peux-tu nous parler de ton dernier voyage à vélo en famille en Europe ?
Olivier : En 2020, on a un deuxième enfant. On s’est dit qu’en s'adaptant, en changeant un peu notre approche logistique, on allait quand même pouvoir s’en sortir et repartir à vélo (rires). Nous voilà donc repartis avec notre fils de 6 ans et notre petite fille de dix mois. De Lyon, on a parcouru la Via Rhona jusqu'à Genève, où l’on a embarqué dans un train jusqu'à Hambourg pour ensuite traverser le Danemark, et continuer en Suède. Au total, on a fait 3000 km pendant l’été 2021.
Ton dernier livre A vélo en Europe est paru chez Gallimard en mai dernier, peux-tu nous en dire plus ?
Olivier : Ce livre est le deuxième tome d'une série que j'ai commencé en 2020. Le premier s'appelait “A vélo”, une sélection de 50 itinéraires uniquement sur le territoire français. Mon éditeur m’a ensuite re contacté en 2022 en me disant « on aimerait bien refaire la même chose, mais cette fois-ci, en prenant tout le territoire européen comme base ». Je n’avais pas assez d’expérience sur les voyages en Europe pour mailler l’intégralité de la carte, j’ai donc fait appel à des copains voyageurs à vélo, qui, eux, avait voyagé sur d'autres destinations, ce qui nous a permis, au final, de fournir un livre avec des itinéraires sur 25 pays en Europe. Des parcours qui vont d’environ une semaine jusqu’à plus d'un mois.
Quel est ton itinéraire coup de cœur en Europe que l’on retrouve dans ton livre ?
Olivier : C’est toujours très difficile de choisir… J’ai bien aimé la traversée du Danemark, c’est vraiment l’itinéraire familial par excellence. En route, tu peux dormir dans des abris ouverts en accès libre. Tu renoues vraiment avec cet esprit de la cabane avec les enfants, ça facilite la logistique aussi de ne pas devoir monter la tente. C'est un pays qui est vraiment ancré dans la culture du vélo depuis des décennies. On est donc en sécurité quasiment partout. Il y a des voies cyclables protégées, sécurisées, qui permettent de progresser sans être dans le flux des voitures. J’ai aussi été très surpris par la diversité des paysages, avec des forêts verdoyantes, pleins d’endroit très fleuris, des moulins, et des plages immenses sur lesquelles on peut rouler à vélo ! Nous avons adoré toute la culture scandinave autour des vikings, qu'on retrouve progressivement en visitant les lieux, c’est super riche ! C’est un itinéraire d'environ 1000 km que je propose dans le bouquin.
Qu'est-ce que tu dirais à une famille qui aimerait se lancer dans une première aventure à vélo ?
Olivier : Souvent, les gens me disent : « ça nous donne vraiment envie mais on ne se lance pas car on n'a pas le bon matériel ». Dans un premier temps, il ne faut vraiment pas que ce soit un obstacle. Pour une toute première, lancez-vous sur un week-end. C’est très facile de partir un week-end à vélo en France. Il existe de nombreux livres, guides, sites internet qui permettent de repérer les itinéraires cyclables à proximité de chez soi. L’idéal est de commencer par un périple court, deux jours par exemple. Réaliser 30-40 kilomètres dans la journée, c'est déjà très bien pour une première. Ainsi on teste le matériel, le vélo etc … L’idée c'est simplement de faire le premier pas, le plus difficile, c'est souvent de se lancer !
Tu dirais que la France est un pays bien adapté à la pratique du voyage à vélo ?
Olivier : Oui, et c'est en plein essor. On le voit à travers le schéma national de développement des vélos routes, on gagne des kilomètres chaque année. Il y a énormément de possibilités. En voyage à vélo en famille, le plus important c’est d'emprunter un parcours qui soit à l'écart de la circulation, sur les petites routes et chemins. Ou des voies vertes comme la Dolce Via en Ardèche, des petits parcours qui font moins de 100 km, qui sont abordables sur un week-end et qui permettent vraiment de mettre le pied à l’étrier. Les infrastructures ne manquent pas pour dormir et manger. Donc, voilà il faut se lancer !
Quels sont tes projets à venir ? La prochaine aventure à vélo en famille ?
Olivier : Ah des envies, oui j’en ai plein ! C'est toujours le temps qui manque un peu. La prochaine aventure, c'est cet été, je pars avec mon aîné, qui va avoir huit ans, et qui voyage maintenant avec son propre vélo. On part dans les Pyrénées, sur la Pirinexus, une boucle de 350 km à cheval entre l'Espagne et la France, en Catalogne. Le défi, c’est de le réaliser avec lui ! Mais si on est fatigué, on se met pas la pression, l’idée du voyage à vélo c’est vraiment de prendre du plaisir, on n’est pas dans une course contre la montre, au contraire !
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